> Article de presse traduite en français

Hsin Tao ou l’art de l’Éclairé – par Nicole Wiegandt, 2004

C’est une belle journée d’avril, les rayons de soleil brillent à travers les fenêtres, dessinant des pyramides de cristal sur les carreaux et des arcs-en-ciel sur le parquet. Un doux parfum de rose provenant  d’une lampe aromatique remplit la pièce. Deux femmes parlent entre elles à voix feutrée, mais la majorité des 60 participants dont je fais partie, sont assis tranquillement à leurs places, vérifiant de temps en temps le contenu de leur sac ou simplement rêvassant. Nous sommes tous excités en attendant l’arrivée de l’Australien Ratziel Bander qui va nous enseigner le Hsin Tao, en ce paisible samedi.

Pendant ces derniers mille ans, ces mouvements gracieux sont restés la propriété et le secret des moines chinois dont le rang était le plus élevé dans le temple de Shaolin. Eux seuls les pratiquaient et en étaient garants. C’est seulement très peu de temps après ce nouveau millénaire que cette technique a été révélée à un plus grand nombre de personnes grâce à Ratziel Bander.

On dit du Hsin Tao qu’il travaille sur le mental, le physique et le spirituel, apportant de profonds  résultats de guérison en fonction de chaque individu.

Des témoignages enthousiastes ont attisé ma curiosité : une femme condamnée au fauteuil roulant  commence à sentir des chatouillements dans ses jambes, un asthmatique capable de réduire peu à peu ses médicaments, une femme en dépression malgré des mois de psychothérapie qui ressent un mieux dès la première heure d’exercice. Cette pratique peut-elle avoir des effets si étonnants ? Aujourd’hui, je tiens à en savoir plus et à me faire ma propre opinion.

Au moment où Ratziel Bander pénètre dans la pièce et s’installe sur l’estrade en face de nous, je suis immédiatement impressionnée par le calme et la puissance qui émane de lui. À l’opposé de nos jeans et vêtements de jogging, il porte un élégant kimono en soie blanche. Il se concentre intensément et regarde notre groupe dans son ensemble.

Avec toute l’énergie qu’il dégage, je trouve difficile à croire le fait qu’il ait été si sévèrement malade il y a à peine quelques années, au point de ne pouvoir tenir, dans son lit, un livre à la main. Une rechute de la maladie qu’il avait attrapé étant enfant, connue sous le nom de syndrome de post-polio, a secoué son corps d’horribles crampes l’empêchant de faire la moindre chose. Aucune aide médicale ne pouvait en venir à bout. Le miracle vint de là où il s’y attendait le moins. Un ancien moine de Shaolin et Maître en Tai Chi que Ratziel avait connu 20 ans auparavant, lui délivra le secret d’une technique d’auto guérison qui pouvait l’aider. Extrêmement sceptique, il accepta  néanmoins l’offre et devint son élève. Alors qu’il la pratiquait de façon très assidue,  Ratziel remarqua que ses crampes douloureuses s’espaçaient. Au bout de 9 mois, elles s’arrêtèrent complètement. 2 ans plus tard, il était transformé. Calme et clair intérieurement, en bonne forme, il était prêt à enseigner, à son tour, le Hsin Tao. Notre groupe est le deuxième à Munich à avoir appris cette technique avec Ratziel Bander.

« Détendez vos épaules, placez vos mains sur votre ventre. Durant ce premier exercice, Ratziel fixe notre attention sur notre estomac, lequel, au rythme de notre respiration, se soulève puis se creuse, se soulève puis se creuse….

La pièce est devenue très silencieuse. Seules quelques respirations de-ci et de là. Nous apprenions progressivement à nous remplir d’énergie en inspirant profondément. Ce n’est pas aussi facile que je ne l’ai d’abord pensé. « Je vous entends respirer ! Respirez  sans souffler. »

La même question se lit sur tous les visages. Il nous fait remarquer que nos muscles sont contractés quand il y a un bruit accompagnant l’inspire et l’expire : le larynx se rétrécit et le souffle ne peut passer librement. « Munich a des difficultés à se relaxer » dit-il avec un clin d’œil complice. « Encore une fois ? »

Ratziel prononcera ces mots plus d’une fois au cours de la journée. Après quelques essais, nous réussissons à combiner cette nouvelle et inhabituelle façon de respirer en un lent mouvement de balancier du torse. Je me laisse moi-même, emporter par ce doux mouvement de mon corps et par la chaleur qui s’installe dans mon ventre. Je me sens intérieurement si incroyablement légère que je souris.

Les bébés et les enfants respirent ainsi d’eux-mêmes, leurs ventres se soulèvent et s’abaissent comme un soufflet. De cette façon, ils captent de l’énergie au milieu de leurs corps. Cette énergie qui nourrit et réchauffe l’organisme. Les adultes perdent cet instinct, et leur respiration se fait plus haute et plus courte. Nos corps se refroidissent et cela provoque des problèmes de santé : douleurs de dos, infections de l’appareil uro-génital, problèmes de digestion, en sont quelques-uns uns parmi d’autres.  De plus, le corps se dessèche, la peau se ride etc. Le Hsin Tao nous enseigne à nous régénérer en respirant profondément comme le font nos enfants.

La légende veut que le Hsin Tao prenne sa source dans les années 1350 avec un moine nommé Bodhi Darma. À l’âge de 19 ans, le plus jeune fils du souverain indien King Sugandha était parmi les meilleurs étudiants dans les disciplines du Veda, la Médecine, la Méditation et la Philosophie. À l’âge de 25 ans, on lui enseigna une nouvelle discipline : le combat sans arme et il passa maître dans cet art.

Son vif intérêt pour la religion et la méditation n’était pas du goût du roi. Il poussa son fils à se marier, mais Bodhi Darma choisit une autre voie et devint moine. Il partit de chez lui et commença à voyager. Plusieurs années s’étaient écoulées quand il arriva dans la province de Honam en Chine. Là, il s’installa dans un sous-sol près du monastère de Shaolin pour pratiquer la méditation et atteindre la lumière comme Bouddha. Au bout de 9 ans, il avait atteint son but, mais l’immobilité dans laquelle il était resté l’avait beaucoup vieilli. Son corps était affaibli, raide et tout tordu.

Avec l’aide d’un esprit éclairé, Bodhi Darma développa une série de mouvements subtils et extrêmement efficaces qui ont guéri et rajeuni son corps, son mental et son âme, en un temps très court. Il commença alors à enseigner aux moines de Shaolin, qui souffraient aussi de leur longue méditation immobile, les mouvements ainsi que l’art martial indien qu’il avait appris dans sa jeunesse. (En plus, il développa pour les moines une série de 18 postures de défense, sans armes, aujourd’hui connues sous le nom de Kung Fu.). Après un entraînement avec Bodhi Darma, les moines, proies faciles des voleurs durant leur périple dans la jungle, se firent une solide réputation en multipliant les prouesses dans les arts martiaux, dissuadant ainsi d’éventuels bandits.

L’adresse étonnante des moines est le résultat d’un des exercices de Hsin Tao: « Le Saint étire sa taille » ; Il équilibre et guérit le corps de l’intérieur. Bodhi Darma se servait du pouvoir régénérant de cet exercice pour redresser son corps courbé et assouplir ses articulations.

Debout, nos jambes légèrement pliées, nous nous balançons d’avant en arrière sur nos plantes de pieds. Ratziel nous montre comment le rythme naturel de notre respiration conduit  le mouvement et comment les bras et le bassin s’harmonisent avec lui. Cela paraît si facile quand il le fait, mais encore une fois, ce n’est pas aussi simple que cela paraît, d’ailleurs, je réalise que ma bouche est tendue dans un effort de concentration. « Sans effort, la bouche se relaxe. » De façon évidente, d’autres personnes partagent mon problème. Je continue. Au bout d’un moment, je suis capable de coordonner ma respiration aux mouvements des bras et des jambes.

Plus tard quand  nous nous entraînons les yeux fermés, mon corps se réchauffe. Mon cœur bat rapidement bien que je bouge lentement en mouvements synchronisés avec ma respiration. Je commence à transpirer de partout, mes mains me semblent rougir sous l’effet de la chaleur. Que m’arrive t il ? Je suis impressionnée par la hausse de température et je continue le mouvement, tout simplement, parce que mon corps me signale que c’est bon pour lui.

À la fin de cet exercice qui semble une petite éternité, nous nous allongeons par terre et nous nous relaxons. Les yeux fermés, j’inspire 2 ou 3 fois profondément et j’observe mes sensations. Un léger fourmillement, comme un flux d’énergie, traverse mon corps. Je me sens réchauffée, et en état d’apesanteur en même temps, j’entends Ratziel dire d’un ton calme « c’est très facile de lâcher de l’intérieur. Si vous ressentez une douleur, laissez là aller, voyez ce qui se passe. Il explique un moment plus tard qu’il est important de faire ces exercices en douceur sans faire trop d’efforts. Les premiers signes de succès : cette sensation de chaleur, de transpiration, le fait de saliver plus que d’habitude, autant d’indices que le processus de rajeunissement a démarré de l’intérieur.

Fatiguée par toutes ces nouvelles impressions qui se bousculent dans ma tête, je retourne m’asseoir sur mon siège après la pause. Le dernier exercice “ le Saint prend son médicament ” semble m’être spécialement dédié puisqu’il calme le mental.

Il émane de chaque mouvement une beauté muette. Les extrémités des doigts caressent l’air, glissant comme à travers l’eau tandis que les bras dessinent des demi-cercles autour du corps. Mon mental devient si silencieux que j’ai l’impression que quelqu’un est entré dans ma tête et a baissé le volume de mes pensées. Pendant une seconde, ‘’je suis’’ simplement. J’ai peine à le croire. Je suis tellement ravie que mes pensées recommencent à tournoyer comme des flocons de neige dans un globe de verre.

Ratziel nous montrant l’exercice les yeux fermés, semble enchanté bien que très concentré. Un léger sourire aux lèvres, il exécute ses mouvements avec une telle dévotion, lentement et majestueusement, que je me sens à la fois pleine de respect et intimidée. La pièce devient si paisible qu’on pourrait entendre une épingle tomber. Tous semblent retenir leur respiration afin de ne pas déranger la grâce et la beauté dont nous sommes témoins. Nous commençons à ressentir à quoi peut ressembler l’extase religieuse dont parlait Ratziel au début de l’exercice. Pratiqué régulièrement, le Hsin Tao vous emmène graduellement à ce ressenti : d’abord vous vous sentez tranquille, puis ce calme devient de plus en plus profond  jusqu’à ce que vous atteigniez cet état de grâce.

Il n’est pas nécessaire d’atteindre la perfection dans les mouvements, nous dit Ratziel, à notre grand soulagement. Les résultats sont ce qui compte. Plus on pratique souvent, dans la détente et dans la joie, plus ils s’intensifieront.

À la fin de la journée, tandis que je plie ma couverture et range mon calepin, je songe en quittant la pièce avec les autres participants, que ce n’est pas la fin de quelque chose mais un commencement. Quelque chose de nouveau, quelque chose que je ne peux pas encore saisir avec mon mental, quelque chose qui, avec l’aide du Hsin Tao, va m’emmener dans une nouvelle dimension. Pour la seconde fois de la journée, je sens mon visage s’éclairer d’un sourire. Un merveilleux sentiment.

Nicole Wiegandt—2004





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